Le paradoxe de Noël
Oui, Noël ce n'est que dans un mois, mais forcément, entre les décorations qui s'installent petit à petit, les catalogues qui se déplient ou les magazines qui commencent à nous en parler, ben Noël, on y pense, on le ressent presque. Et dire que Noël devrait éveiller joie et bonheur au fond de chacun de nous, chez moi ça fait exactement l'inverse.
Il fût un temps où Noël était ma période préférée. Pendant la majorité de ma vie en fait. C'était la quintessence des souvenirs familiaux heureux, quelques jours de vacances scolaires baignés dans une ambiance magique, de gentillesse, de fraternité, de surprises, de fête, de cadeaux, du Disney de Noel lol... cette ambiance chaleureuse, je l'ai vécu de façon régulière ici, à Paris, presque comme un rituel (j'en parlerais plus en détail dans un futur article). Je me souviens que dès que nous dérogions à certaines règles (ouverture des cadeaux le soir plutôt que le matin, dans une chambre plutôt que le salon, soirée de Noël dans la famille du sud de la France plutôt que chez nous, un sapin trop petit etc), ce n'était plus tout à fait Noël.
Mais depuis mes 22 ans, les fêtes de Noël ont été beaucoup plus chaotiques. Ma famille n'y est pour rien, mais disons que je n'ai jamais retrouvé la même magie qu'à l'époque. Il y avait toujours des problèmes qui venaient gâcher l'expérience: soit ma soeur était absente car vivait alors en Australie (ce qui était beaucoup moins motivant pour se lever le matin de Noel comme nous le faisions depuis 20 ans), soit j'avais des problèmes avec ma copine (sur les 3 Noel traversés par notre relation, je crois que nous n'en avons vécu aucun conjointement et en toute sérénité, ce que je déplore). 2004 fût un Noel gâché par la découverte de la tumeur de mon père qui devait se faire opérer quelques jours plus tard. Quand à 2005, ce fut le couronnement de tout: ni père, ni soeur, ni mère (partie rejoindre ma soeur en Australie), énorme déception sentimentale qui me hantait jours et nuits... bref j'ai passé ce Noel là à Sarlat avec mes cousins et ce fût un des pires de ma vie. Rien à voir avec Sarlat bien sûr, mais j'ai alors compris qu'une page de ma vie avait définitivement été tournée, que rien ne serait plus comme avant. Les Noëls passés chez nous, en famille, ensemble... c'était bien fini.
Mais alors que le pire semblait avoir été atteint, Noël version 2006 se profile... et ça ne sent pas bon du tout. Ma soeur est toujours en Australie, ma mère sera encore absente (j'avoue que j'ai eu le choix, mais c'est clair que je me vois pas fêter ça ici à deux, dans ce grand appartement), bref je suppose que c'est encore à Sarlat que je vais finir... où l'on me couvrira sûrement d'affection et de mots gentils, que j'aurais du mal à entendre tant le moral devrait être au plus bas: toujours pas de job et rien en vue, des séquelles sentimentales qui ont du mal à refermer, le souvenir d'êtres chers ayant quitté ma vie d'une façon ou d'une autre et qui me manquent... tous ces sentiments qui sont exacerbés dans les saisons propices au regroupement, au partage et à la fête. Tout ce qu'on camoufle le reste du temps et qui ressortent plus violemment que jamais en cette période de l'année.
Oui, une page a bien été tournée. Désormais les cadeaux, j'en fais aux autres et à moi-même, les jouets d'antan ayant été remplacés par des chèques placés sur des comptes épargne dont je connais le montant à l'avance... désormais, j'accepte les invitations plutôt que d'organiser la fête à la maison comme tous les jours de Noël. Désormais je vis ça entre amis ou chez la famille proche plutôt qu'avec les personnes portant mon nom. A vrai dire, Noël ne porte justement plus que le nom, désormais je m'en fiche, ou pire, je le redoute. Tout ce que j'espère, c'est qu'il s'agit là d'une période de transition. Oui Noël ne sera jamais plus "comme avant". Mais Noël peut encore retrouver toute sa magie, cela ne devrait pas être bien difficile pour l'enfant qui est toujours en moi. Je rêve donc de temps meilleurs, où je pourrais repenser aux Noëls de mon enfance avec plaisir, et savourer à nouveau, en couple ou dans une famille reformée, aggrandie ou recomposée, des instants de bonheur, peut-être différents mais qui auront la même saveur exquise. Où je me sentirai assez bien avec moi-même pour donner et recevoir avec plaisir. Bref, re-vivre ces Noël de rêve qui nous ont tant marqué par le passé...